jeudi 10 juillet 2008

"Zawaj", un événement aux allures de téléréalité

«Zawaj», un événement aux allures de téléréalité

La saison des mariages est entamée. Quoi de mieux qu’un bon mariage traditonnel en bonne et due forme, surtout quand on y met le paquet.Plusieurs futurs couples, surtout ceux de condition modeste, sont constamment angoissés par l’adage marocain stipulant que « pour les noces d’une nuit, il faut réfléchir un an à l’avance ».
L’association des œuvres sociales, culturelles et sportives de Derb Soltane semble adhérer à d’autres doctrines puisque, aux allures d’une émission de téléréalité, Derb Soltane à Casablanca vit depuis une quarantaine de jours un mariage collectif à l’image d’un festival. Riche en compétitions de tout genre, « Zawaj » a offert à la population locale son propre événement défouloir. Pour la cérémonie de « l’hdya » (cortège) des treize couples choisis jeudi dernier, les femmes et les enfants étaient nombreux à y assister.
Le cortège avait pour point de départ la rue Drissia, à l’endroit où il y a eu l’attentat terroriste du 10 avril 2007. Une grande charge symbolique vient envelopper l’événement, surtout que ses organisateurs le veulent coïcidant avec les 12 siècles de la constitution de l’Etat marocain, d’où la sélection initiale de douze couples. Le cortège a sillonné l’avenue Sanhaji, Derb Al-Fida, la rue de Sahat Sraghna, puis Bouchentouf en passant par la rue N° 5 de Laqriâ et 10 de Derb L’foqara, pour arriver à son terminus à Garage Allal.
« Zawaj » a reçu l’entière approbation et le financement de la région du Grand Casablanca ainsi que de la commune locale. Le montant global de l’ensemble des activités tourne autour de 2.500.000 dihrams. Le rôle des sponsors consistaient à offrir des fournitures, matelas, électroménager blanc et brun et autres produits estimés nécessaires à la bonne entame de la vie conjugale des nouveaux couples.
A rappeler que la première étape de « Zawaj » s’est déroulée du 18 au 23 mai. Le festival se voulant une image du mariage traditionnel, entamait son programme avec un concours de la lecture du Coran. Trois catégories d’âge y participaient. Le tout couronné par une soirée spirituelle le 22 mai. S’en suivirent la compétition spéciale « coiffeur et neguafa » des mariés, déroulée du 18 au 22 juin dernier. La cérémonie de jeudi dernier a été couronnée par une soirée musicale à la place Al Amal, avec la participation de Nadia Ayoub, Mesnaoua, Aïcha Tachinouit, Saïd Mouskir, Oulad Banaguida et présentée par Saïd Mouskir, le tout animé par l’infatigable Atik Benchiguer. La forte présence populaire avait repoussé la fin de la soirée jusqu’à 2h15 du matin.
Jeudi, la bibliothèque de Derb Soltane avait rendez-vous avec la lecture publique de la trilogie de Moubarak Rabiî, se rapportant entièrement sur Derb Seltan. Une cérémonie pour rendre hommage au natif de la région figurait aussi au programme. Décidément, la circonscription s’est grandement investie dans son événement personnalisé, digne d’une ville entière. La nuit d’hier a assouvi la soif des fans de L’hajja l’Hamdaouia, invitée phare à la scène Al Amal, suivie sur scène par Âbidate Errma, Chebba Daoudia et Saïd Moskir. Saïd Naciri en a fait la présentation.Le programme n’en est pas encore à son terme.
Le sujet de cette matinée du samedi vient ajouter la légitimité historique à cet événement. Dr. Abdelhadi Tazi donne aujourd’hui vers 11h une conférence-débat sur «L’évolution historique de la cérémonie du mariage au Maroc » au siège de la région du Grand Casablanca. Et ce n’est pas fini. Le même siège abritera la cérémonie finale, où chaque couple aura le droit de choisir 20 convives, 10 de chaque famille pour y assister. Les mariés seront attendus par une limousine à la sortie, et acheminés chacun vers l’hôtel pour la nuit de noces. En parallèle, la 3ème soirée de la place Al-Amal nous convie à assister à un groupe d’artistes locaux accompagnés de Mohammed El Khyari et présentés par Khalid Nizar. Une tombola permettra aux heureux gagnants de bénéficier de trois appartements. Une expérience réellement unique qui vient raviver des quartiers pauvres et touchés par plusieurs maux sociaux. Tentative courageuse mais chargée d’émotions, avec tout le réalisme et l’audace qui manquent à nos émissions de téléréalité.
Iliasse El Mesnaoui - Libération du 5 - 6 juillet 2008

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lundi 7 juillet 2008

El Jadida, une destination du tourisme culturel et patrimonial

El Jadida, une destination du tourisme culturel et patrimonial

En été, El Jadida est une destination préférée des MRE, et un passage quasi-obligé pour les amateurs du soleil et de la mer. Mais peu viennent pour découvrir le riche patrimoine de Mazagan, ou s’enquérir de l’histoire de la ville d’El Jadida écrite en arabe, en français et en portugais, et relatée par ses vieux édifices.
La citerne du quartier portugais est la fierté d’El Jadida, le produit type de l’architecture portugaise. Elle est située en plein coeur du quartier portugais, considéré comme l’un des bâtiments clefs de l’histoire de Mazagan. Du temps des Portugais, la citerne était remplie d’eau. Elle servait de réservoir à la ville. Elle a été découverte en 1916 tout à fait par hasard par le juif marocain Ben Attar qui voulait agrandir sa boutique. On a mis trois mois pour la vider de son eau. Pour alimenter la ville, l’eau partait de canalisations, aujourd’hui bouchées.
Il y a onze marches à descendre pour y accéder. On fait couler cinq centimètres d’eau sur son sol pour refléter son plafond, ce qui accroît le charme de l’endroit. Avant, la hauteur de l’eau dans la citerne était de 2m50 qu’un trait rouge indique sur ses murs. La citerne fut bâtie en 1514 et utilisée comme salle d’armes, douze ans après que les Portugais eurent foulé le sol d’El Jadida en 1502. Elle n’est devenue réservoir qu’en 1541. C’est un bâtiment de 34 mètres carrés, parsemé de 25 colonnes. Dans sa construction se mêlent la pierre issue de Jorf Lasfar, les briques de Zemmour et la chaux du Portugal.
Un autre monument, situé à 5 km de la ville, peine à trouver la reconnaissance de ceux qu’il avait aidés, deux siècles et demi plus tôt, à libérer la ville. A cent mètre à la sortie de l’autoroute, Ribat al-Moujahidine, dit aussi « Fahs Ezzemouri » est d’une superficie avoisinant les cinq hectares. Il fut construit au 18ème siècle, durant l’embargo imposé par le sultan Mohammed Ben Abdallah sur Mazagan pour la libérer des mains des Portugais. Son rôle était d’abriter les troupes du Sultan venues de Marrakech en janvier 1759, grâce auxquels Mazagan obtint sa libération en mars de la même année. Il s’agit plutôt d’un campement militaire.
Ribat Al-Moujahidine était composé d’une mosquée et de certains monuments militaires, dont il n’en reste que les murs détruits et la porte d’entrée. L’intérieur est vaste et non construit. On suppose qu’il était investi de tentes auxquelles on recourait fréquemment à l’époque pour passer la nuit. Un passage souterrain se trouve près de la porte d’entrée. On dit qu’il était relié au phare de Sidi Mesbah pour assurer l’approvisionnement. Les murs sont d’un mélange de pisé et d’autres matériaux. Les phases de construction sont soit superposées, après une durée, soit construites en même temps. Il faudra attendre les résultats des recherches archéologiques pour le savoir.
Les archéologues justifient la facilité et la rapidité avec laquelle il s’est dégradé par le fait qu’il soit un monument léger et destiné au campement temporaire du roi. N’empêche que si ce monument avait intégré l’une des nombreuses stratégies de préservation et de restauration du patrimoine, ses remparts n’auraient pas été sous leur forme actuelle. On n’a même pas entrepris de l’entourer de clôtures, et ce pour manque de fond ! Ce n’est que récemment qu’on vient d’envoyer une requête au ministère de la Culture pour le classer monument national. Ironie du sort, le monument duquel on assiégeait les Portugais, a besoin d’être assiégé. Cette fois avec des clôtures pour en empêcher la déformation totale puis la disparition.
Peu de textes historiques font état de l’existence de ce campement. Seul l’ouvrage d’Ahmed Ben Khaled Naciri, « Kitab al istiqsaa » en fait mention. Seules quelques gravures persistent. Ce site est caché, peut-être ce fut un choix militaire qui justifiait sa position. C’est lors du tracé de l’autoroute qu’on l’a découvert. Ceci dit, c’est par hasard que le tracé de l’autoroute est passé à côté, rien n’empêchait la compagnie de le raser s'il y figurait.
Nul n’aurait garanti sa présence aujourd’hui. Ces deux monuments ne sont qu’une partie d’une large étendue de monuments et sites historiques qui pullulent dans les alentours. Seule une réelle promotion du secteur du secteur touristique, prenant en compte la grande valeur du patrimoine historique jdidi, pourra concilier tourisme et patrimoine, et relancer l’économie de toute une région.

Encadré : L’histoire de Mazagan

Les Portugais occupèrent la région, précieuse par sa valeur stratégique. Ils fondèrent la forteresse de Mazagan vers 1506. La ville elle-même fut fortifiée dès 1542, et c’est grâce à ses épaisses murailles qu’elle est devenue une citadelle redoutable.Le Maroc a essayé de la libérer pendant longtemps. Durant deux siècles, Mazagan résista aux assauts. Les Portugais ont même dû transformer le grenier en citerne pour stocker l’eau potable afin de tenir longtemps face à ces assauts (citerne portugaise). La présence portugaise prit fin en 1769, quand la ville fut libérée par Sidi Mohamed Ben Abdallah. C’est le même sultan qui a donné à la ville son nom actuel. Avant elle était appelée Mazagao. Terme portugais, lui-même puisant dans l’appelation berbère « mazighen ». Les Portugais avaient soumis la ville et non pas occupé. On leur payait une taxe pour y vivre.
Iliasse El Mesnaoui - Libération du 5 - 6 juillet 2008

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