vendredi 27 juin 2008

Interview avec Amazigh Kateb

Entretien avec Amzigh Kateb

“le public s’est habitué à des artistes carriéristes”

Amazigh Kateb, ex-leader du groupe mythique Gnawa Diffusion, membre actuel de Desert Rebel, est un artiste hors pair. A l’occasion du 10ème anniversaire du Festival L’Boulevard, il préside une résidence artistique basée sur l’improvisation et le métissage entre différentes cultures.

Libé : La dispersion de votre premier groupe «Gnawa Diffusion» a choqué beaucoup de vos admirateurs marocains. Pourriez-vous nous dire plus sur cette séparation?

Amazigh Kateb : Rien de spécial. On avait déjà décidé d’arrêter depuis un moment parce qu’on avait tous des projets. Personnellement, j’ai des projets que je suis en train de préparer pour l’année prochaine inchallah. Donc, il fallait que j’arrête «Gnawa diff» pour passer à autre chose dans ma tête, et puis aussi parce que je pense que le public en général s’est habitué à des artistes carriéristes. Des artistes qui tiennent à leur carrière et qui pensent que s’ils ne font pas carrière, ils ne vont pas pouvoir vivre. Pour moi, c’est tout à fait le contraire. Je pense qu’un artiste ne doit pas s’éterniser dans une carrière. Il ne faut pas trop s’accrocher à un nom. Sinon on devient esclave de sa propre liberté. Et aussi, on a arrêté « Gnawa Diff » parce que l’artiste doit prendre des risques. Il ne faut pas qu’il se contente d’être à l’aise et qu’il se dise : j’ai mon public, mon groupe... Il faut surtout qu’il continue à se chercher.

Libé: Apparemment, vous avez trouvé votre liberté dans cette nouvelle formation ?

Amazigh Kateb : Cette formation est ponctuelle. Ce n’est pas du tout ma nouvelle formation. Dans mon nouveau groupe, on est quatre. Il y a juste guembri, mandole, voix, DJ et percussions. C’est vraiment très minimaliste. «Résidence L’Boulevard» est un groupe comme son nom l’indique pour une résidence entre artistes. On a travaillé pendant dix jours et la prestation lors de la clôture de cette édition du Boulevard en est le fruit. On ne sait pas encore si on va rejouer ou pas. On ne sait pas encore s’il va y avoir d’autres périodes de répétition pour nous. En tout cas, c’est une expérience unique.

Libé: Pensez-vous que les groupes marocains de fusion peuvent prétendre au titre d’incontournables sur la scène internationale?

Amazigh Kateb : Oui, il y a un gros potentiel artistique, après une histoire de chance, de parcours, de choix, de données… En tout cas, c’est clair que de tous les phénomènes qui peuvent se passer au Maghreb, le Maroc et la Tunisie sont en tête de l’organisation de festivals. En Algérie, par exemple, il y a très peu de festivals. Ici, quand même, je trouve qu’il y a de plus en plus d’occasions pour les musiciens de jouer, de se confronter les uns aux autres, de faire les mêmes scènes, de maîtriser ce que c’est qu’un problème technique, à titre d’exemple. Ce sont des choses importantes qu’ils ne peuvent pas apprendre théoriquement. C’est la bonne route.

Libé : Votre père fut un grand écrivain, vous êtes un grand artiste. Qu’espérez-vous pour votre fils?

Amazigh Kateb : Pour l’instant, je n’ai pas de fils mais en tout cas si j’en conçois un, j’aspire à ce qu’il fasse son propre chemin dans la vie.

Propos recueillis par Iliasse El Mesnaoui - Libération du 27 juin 2008

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